Vous vous souvenez sans doute d’avoir, de temps en temps, très fortement désiré quelque chose. Par exemple, réussir un examen scolaire difficile ? Ou bien, obtenir un travail particulier ou un contrat profitable monétairement ? Ou encore, qu’une opération chirurgicale soit une réussite, pour vous-même ou pour quelqu’un d’autre qui vous est proche ?
Dans l’évangile de ce matin, Bartimée, un aveugle, désire fortement être guéri de son infirmité. Il crie : « Jésus, prends pitié de moi ! » En fait, il souffre de deux afflictions : un handicap physique et le handicap social d’être un mendiant, un individu considéré comme impur et donc à éviter.
Deux fois, cet homme crie afin d’obtenir la délivrance de ce double malheur, et les gens le rabrouent pour le faire taire. Mais Jésus, qui est en marche – notons ce détail –, s’arrête et ordonne : « Appelez-le. » L’aveugle jette alors son manteau et court vers Jésus. Pourtant celui-ci le met à l’épreuve en lui demandant : « Que veux-tu que je fasse pour toi ? » Jésus aiguise ainsi le désir que l’aveugle ressent. L’aveugle s’exclame : « Que je retrouve la vue ! »
Jésus lui répond : « Va, ta foi t’a sauvé. » Jésus a perçu la foi qui inspire la demande de l’aveugle. Quand un désir est accompagné d’une confiance totale, il s’intensifie, il devient ce que certains mystiques ont appelé « un saint désir ». Pour les auteurs du Nouveau Testament, retrouver la vue dénote non seulement un miracle biologique, mais surtout un miracle spirituel : c’est commencer à voir avec les yeux de la foi, avec les yeux de l’amour.
L’évangéliste Marc ajoute : « Aussitôt, l’homme retrouva la vue, et il suivait Jésus sur le chemin. » Suivre Jésus sur le chemin que Jésus emprunte, cela signifie symboliquement qu’une personne se décide à imiter Jésus en le suivant sur un chemin ardu, un chemin de pèlerin avec ses détours et surtout avec ses montées pénibles lorsque le pèlerin a déjà marché pendant de longues heures.
Nous aussi avons un besoin fondamental d’être guéris de nos blocages psychologiques et spirituels. À cet égard, l’exemple de Jésus est réconfortant : il a partagé notre humanité, dans ses hauts et ses bas, et il a accepté nos limites. Il est ainsi capable d’être pour nous un guérisseur actif ; sa douce et fidèle présence nous console et nous soutient tandis que nous souffrons à cause de nos blessures et de celles des autres. De plus, il nous apprend la manière de nous comporter avec des gens difficiles ou des individus injustes, c’est-à-dire avec fermeté et compassion.
Cet exemple de Jésus est tout à fait en accord avec la description de Dieu que le prophète Jérémie élabore dans un très beau texte qui constitue notre première lecture d’aujourd’hui. Le Seigneur Dieu proclame, en effet :
« Voici que je les fais revenir du pays du nord, que je les rassemble des confins de la terre ; parmi eux, tous ensemble, l’aveugle et le boiteux, la femme enceinte et la jeune accouchée ; c’est une grande assemblée qui revient. Ils avancent dans les pleurs et les supplications, je les mène, je les conduis vers les cours d’eau par un droit chemin où ils ne trébucheront pas. Car je suis un père pour Israël, Éphraïm est mon fils aîné. »
D’après nous chrétiens, cette espérance en Dieu père est donnée non seulement à Israël, mais bien à toutes les nations, malheureusement toujours divisées. C’est pourquoi nous avons la joie de célébrer, une fois de plus, cette grande espérance, en rendant grâce à Dieu pour son aide efficace.
Louis Roy, OP
Marc 10,46b-52 (2024)